Un communiqué du 28 mai 2018 de la Coalition Stop secret des affaires, dont fait partie la Ligue des Droits de l’Homme. Lire aussi Secret des affaires : ONG, syndicats et journalistes appellent les députés à protéger les libertés.
La Commission mixte paritaire (CMP) s’est prononcée jeudi 24 mai sur la proposition de loi « Secret des affaires » portée par le député Raphaël Gauvain. Les députés et les sénateurs (LR et LREM) se sont mis d’accord sur un texte proche de celui élaboré par l’Assemblée nationale.
Aucun des amendements proposés par notre coalition pour protéger les libertés n’a été retenu, contrairement aux engagements pris par l’Elysée.
Pourtant, plus de 550 000 citoyen.ne.s ont signé une pétition dénonçant ce projet de loi, et le 16 avril 52 organisations et 23 Sociétés De Journalistes ont interpellé le président de la République (cf ).
Les parlementaires ont ainsi manifesté leur refus de circonscrire l’application du texte au vol d’informations dans un but de concurrence déloyale. Raphaël Gauvain et le gouvernement ont, au contraire, privilégié une application la plus large possible du secret des affaires.
Ainsi :
- La définition large et floue du secret des affaires permettra aux entreprises de retirer l’essentiel des informations sur leurs activités du débat citoyen
- Les lanceurs d’alerte devront faire la preuve de leur bonne foi devant les tribunaux
- Les représentant.e.s du personnel pourront être poursuivis pour avoir diffusé des informations aux salarié.e.s
- Des organes de presse pourront être poursuivis devant des tribunaux de commerce pour avoir révélé des secrets d’affaires
- Les salarié.e.s pourront voir leur mobilité réduite avec l’interdiction d’utiliser leurs savoirs et savoirs faire, considérés comme des secrets d’affaires
- Les délais de prescription longs et mal définis permettront des poursuites 5 ans après la révélation de secrets d’affaires
Cette loi permettra aux entreprises de poursuivre toute personne ayant obtenu ou révélé des informations sensibles. Ce texte porte gravement atteinte au droit d’informer et d’être informé des citoyen.ne.s français, en privant de source les journalistes et en privilégiant de facto l’autocensure.
Il met en danger l’équilibre démocratique et constitutionnel de notre pays en érigeant le secret des affaires en un principe général et en reléguant la liberté d’information au rang de simple exception.
Alors que la proposition de loi sera soumise au vote final des parlementaires dans le courant du mois de juin, nous les interpellons solennellement : ne votez pas ce texte en l’état, ne laissez pas les entreprises dicter l’info !
Signataires :
Pablo Aiquel, journaliste, SNJ-CGT ; Eric Alt, vice-président de l’association Anticor ; Patrick Apel-Muller , directeur de la rédaction de l’Humanité ; Eric Beynel, porte-parole de l’union syndicale Solidaires ; Sophie Binet, secrétaire générale adjointe de l’UGICT-CGT ; Thomas Borrel, porte-parole de Survie ; Dominique Cellier, président de Sciences citoyennes ; Florent Compain, président des Amis de la Terre France ; Sandra Cossart, directrice de Sherpa ; Antoine Deltour, lanceur d’alertes Luxleaks, Dr Marc Arazi, lanceur d’alerte du Phonegate ; Mathilde Dupré, présidente du Forum citoyen pour la RSE ; Ivan du Roy, journaliste, corédacteur en chef de Basta ! ; Jean-François Julliard, directeur exécutif de Greenpeace France ; Wojtek Kalinowski, codirecteur de l’Institut Veblen ; Patrick Kamenka, journaliste, SNJ-CGT ; Ingrid Kragl, directrice de l’information, Foodwatch ; Marie-José Kotlicki, secrétaire générale de l’UGICT-CGT ; Elliot Lepers, directeur de l’ONG le Mouvement ; Elise Lucet, journaliste ; Jean Merckaert, rédacteur en chef de la Revue Projet ; Patrick Monfort, secrétaire général du SNCS-FSU ; Edouard Perrin, journaliste, président du collectif Informer n’est pas un délit ; Eric Peres, secrétaire général de FO Cadres ; Olivier Petitjean, journaliste, coordinateur de l’Observatoire des multinationales ; Dominique Plihon, économiste, porte-parole d’Attac ; Emmanuel Poilane, directeur général de France Libertés et président du CRID ; Patrick Raffin, photographe ; Christophe Ramaux, économiste à l’université Paris-I, membre des Economistes atterrés ; Clément Remy, président de l’ONG Pollinis ; Laurence Roques, présidente du Syndicat des avocats de France ; Agnès Rousseaux, journaliste, corédactrice en chef de Basta ! ; Bernard Salamand, Ritimo ; Clément Thibaud, président de l’Association des historiens contemporanéistes de l’enseignement supérieur et de la recherche ; Aurélie Trouvé, porte parole d’Attac ; Emmanuel Vire, secrétaire général du Syndicat national des journalistes CGT (SNJ-CGT).
Les organisations Ingénieurs sans frontières-AgriSTA, CrimHalt, le collectif On ne se taira pas !, Action Aid France-Peuples solidaires.
Les sociétés de journalistes de l’AFP, BFMTV, Challenges, les Echos, le Figaro, France 2, l’Humanité, le JDD, Libération, Mediapart, le Monde, le Parisien-Aujourd’hui en France, le Point, Premières Lignes, Radio France, RMC, Télérama, TV5 Monde, la Vie et les rédactions d’Alternatives économiques, Magneto Presse et la Télé libre.