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18 février 2018 7 18 /02 /février /2018 10:27

Quatre personnes sur dix souffrent de la raréfaction de l’eau. Les villes sous pression de l’explosion démographique sont à leur tour touchées et menacées de rupture d’approvisionnement. Par Martine Valo le 17 février 2018 pour Le Monde.

Au Cap, en Afrique du Sud, les habitants viennent se ravitailler en eau, le 2 février. BRAM JANSSEN / AP

Au Cap, en Afrique du Sud, les habitants viennent se ravitailler en eau, le 2 février. BRAM JANSSEN / AP

Alerte à la sécheresse ! Mardi 13 février, les autorités sud-africaines ont proclamé l’état de catastrophe naturelle dans tout le pays. Les 4,5 millions d’habitants du Cap sont menacés de se voir couper les robinets. Au Mozambique voisin, alors que les réserves sont au plus bas, un quart de l’agglomération de Maputo (4 millions d’habitants) est privée d’eau potable, car le gouvernement a décidé d’alimenter en priorité l’agriculture et la production d’électricité. La situation en Afrique australe est révélatrice d’une crise mondiale de l’eau. Elle touche désormais les centres urbains et non plus seulement les campagnes. En 2015 déjà, Sao Paulo, la ville la plus peuplée du Brésil, avait failli connaître elle aussi les affres du « jour zéro ». Puis en 2016, ce fut le tour de Freetown en Sierra Leone, de La Paz en Bolivie, de Ouagadougou au Burkina Faso.

Quatre personnes sur dix souffrent de pénurie dans le monde, selon l’Organisation des Nations unies, qui prévoit une probable dégradation à l’avenir sous l’effet du changement climatique. Le réchauffement va accentuer l’aridité des régions du monde qui en souffrent déjà, contribuer au desséchement des sols, accélérant l’évaporation des végétaux et rendant plus difficile l’absorption des pluies diluviennes qui filent alors trop vite vers l’océan. Les sécheresses à répétition vont aggraver les problèmes que connaissent déjà les centres urbains sous la pression d’une explosion démographique généralisée. Plus de la moitié (54 %) de la population mondiale vit en ville aujourd’hui et les prévisions d’augmentation oscillent entre 60 % et 92 % d’ici à la fin du siècle. Les installations d’alimentation et d’assainissement ne parviennent pas à suivre un tel rythme.

« Réfléchir autrement »

« Ce ne sont pas les mégapoles mais les villes de taille moyenne qui vont avoir le plus de difficultés, car elles manquent non seulement de capacités techniques, mais aussi d’experts à l’esprit grand ouvert pour réfléchir autrement aux défis posés par une augmentation rapide de leur population de 2 % ou 3 % », estime Richard Connor, qui coordonne les rapports de référence réalisés par le Programme mondial pour l’évaluation des ressources en eau (ONU-Eau). Le thème de cette année porte sur les solutions davantage inspirées de la nature que de la technologie pour faire face aux pénuries.

 

D'après Nature Sustainability

D'après Nature Sustainability

Car les hommes épuisent les nappes souterraines dont ils dépendent sans leur laisser le temps de se recharger ; détournent des fleuves en fonction de leurs besoins sans se soucier des conséquences chez leurs voisins ; drainent les zones humides et rejettent les eaux usées dans l’environnement à 80 % sans traitement sur toute la planète. Résultat : les inquiétudes portent désormais sur les sources mêmes d’approvisionnement, et les tensions paraissent inévitables.

D’autant que plus de citadins à nourrir signifie, dans les campagnes, des besoins accrus en eau pour l’agriculture – alors que ce secteur représente déjà 70 % des prélèvements mondiaux. Les surfaces irriguées ont plus que doublé et le cheptel d’animaux domestiques a triplé en cinquante ans, selon l’ONU-Eau. « L’émergence de classes moyennes en Inde, en Chine, qui mangent plus de viande, achètent des machines à laver… accélère la demande globale », résume Richard Connor. Et de souligner :

« Le problème de l’eau reste directement proportionnel à celui de la pauvreté. Au Canada, par exemple, qui est un pays riche, des populations amérindiennes n’ont pas accès à un service d’eau adéquat… »

La Banque mondiale vient d’annoncer qu’elle allait financer à hauteur de 210 millions de dollars (170 millions d’euros) un important projet pour améliorer la desserte en eau potable et l’assainissement de Bagdad. Après des années de guerre, la capitale de l’Irak, dont la population a augmenté de 45 % en trois ans, souffre de fuites dans les canalisations, de coupures en été et d’épidémie de maladies d’origine hydrique, responsables de dysenteries.

Les pays développés sont eux aussi confrontés à des difficultés d’approvisionnement. Aux Etats-Unis, les hydrologues du bassin du Colorado prévoient que le lac Powell, l’un des principaux réservoirs du sud-ouest du pays, risque de ne même pas atteindre la moitié de son niveau habituel (47 %) au printemps, compte tenu des faibles tombées de neige de l’hiver. Or ce fleuve alimente 40 millions de personnes et de nombreuses fermes dans sept Etats américains et jusqu’au Mexique.

Sur les 482 principales agglomérations du monde abritant 736 millions d’habitants, près d’une sur quatre devrait connaître de sérieux problèmes.

En Californie, qui connaît déjà des mesures fréquentes de réduction d’eau, Los Angeles figure en tête des métropoles les plus menacées à l’avenir par les pénuries, indique une étude publiée dans Nature Sustainability en janvier. Celle-ci note que la consommation d’eau domestique a presque quadruplé au cours des soixante dernières années – davantage encore dans les villes, dont la demande pourrait encore augmenter de 80 % d’ici à 2050. A l’aune du changement climatique, la compétition s’annonce rude pour l’eau potable.

Les auteurs de cette étude – des chercheurs de l’université de Cassel, en Allemagne – ont travaillé pendant deux ans, croisant des prévisions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et des recueils de données socio-économiques, en particulier les tendances démographiques. Ils ont systématiquement développé trois scénarios : soit les prélèvements en eau servent en priorité les citadins, soit l’agriculture et l’industrie, soit, enfin, ils protègent aussi les besoins des écosystèmes naturels, maintenant notamment le débit des fleuves. Des éléments qui changent considérablement la donne.

« Un fort potentiel de conflit »

Quoi qu’il en soit, selon cette publication, sur les 482 principales agglomérations du monde abritant 736 millions d’habitants, près d’une sur quatre (27 %, soit 233 millions de personnes) devrait connaître de sérieux problèmes puisque, en 2050, ses besoins en eau seront supérieurs aux volumes disponibles en surface. Et près d’une sur cinq (19 %) de celles qui sont alimentées grâce à des transferts massifs depuis d’autres bassins versants présente « un fort potentiel de conflit entre secteurs urbain et agricole », notent les experts, en particulier dans le sud de l’Afrique, en Amérique latine, en Asie du Sud.

Pourquoi Le Cap ne figure-t-elle pas dans leur liste des 100 villes les plus vulnérables au stress hydrique ? « Parce qu’elle est victime d’une situation de sécheresse conjoncturelle, nos modèles prennent en compte des tendances de long terme, explique Martina Flörke, du Centre de recherche sur les systèmes environnementaux de l’université de Cassel, qui a dirigé l’étude avec son collègue Christof Schneider et Robert I. McDonald de l’ONG américaine The Nature Conservancy. Dans l’ensemble, les risques s’aggravent pour les villes qui manquent déjà d’eau. Et notre recherche devrait alerter les dirigeants : leurs choix stratégiques pour approvisionner les centres-villes affectent aussi les populations de zones rurales déjà soumises à des pénuries, prévient-elle. Il est temps en outre que dans des régions comme l’Amérique du Nord, les gens réalisent qu’ils utilisent beaucoup trop d’eau. »

Les difficultés des urbains ne doivent pas occulter la réalité du moment. Selon l’ONU, qui a revu ses statistiques en 2017, 2,1 milliards de personnes sur la planète n’ont pas accès à une eau gérée en toute sécurité – 263 millions se trouvent même à plus d’une demi-heure du premier point d’eau – et 892 millions défèquent en plein air. La plupart vivent en zone rurale.

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14 février 2018 3 14 /02 /février /2018 18:08

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, zones franches, exonération de la taxe foncière, facilités comptables, niches et allégements en tous genres : au fil des décennies, les pouvoirs publics ont taillé un environnement fiscal et réglementaire sur mesure pour le patronat, sans aucune contrepartie. L’État-providence fonctionne donc très bien… pour les entreprises. Un favoritisme fiscal que rien ne justifie ! D’après Christian de Brie, journaliste. Une version de ce texte vient de paraître dans l’ouvrage collectif Toujours plus pour les riches. Manifeste pour une fiscalité juste, coordonné par l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac), Les Liens qui libèrent, Paris.

Le fléau de l’assistanat … aux entreprises !

Il y a plus de cinquante ans, commentant la réduction de moitié de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, le patron des patrons de l’époque lâchait : « Les carottes n’intéressent pas le patronat. » Depuis, les chefs d’entreprise n’ont cessé d’en croquer par pleins paniers, jusqu’au dernier président du Mouvement des entreprises de France (Medef), M. Pierre Gattaz, fanfaronnant en 2015 qu’en échange de quelques bottes supplémentaires (le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, CICE) on allait créer un million d’emplois. Les carottes ont été livrées. Pas les emplois.

La rhétorique est bien rodée. Un : ne jamais reconnaître avoir bénéficié d’un avantage fiscal, sinon du bout des lèvres et comme une maigre compensation, avant de demander une réduction beaucoup plus importante. Deux : toujours se plaindre des « charges » écrasantes pesant sur les entreprises. Ce discours patronal porte ses fruits : les mesures fiscales favorables s’accumulent... sur le dos de la collectivité.

Seul impôt d’État direct pour les sociétés de capitaux, l’impôt sur les sociétés (IS) est censé taxer annuellement le bénéfice, c’est-à-dire l’enrichissement net d’un exercice sur l’autre, au taux officiel de 33,33 % (1). En réalité, une chimère...

Tout d’abord, les règles ainsi que les pratiques comptables et fiscales permettent aux entreprises de minimiser le bénéfice imposable, qui n’a que de lointains rapports avec les profits réels. Ensuite, les politiques des gouvernements successifs ont accordé aux sociétés des allégements, dispersés dans un grand nombre de niches, censés les inciter à adopter tel ou tel comportement ou à améliorer leur compétitivité. De plus, les entreprises jouent le rôle d’auxiliaires du fisc, en tant que collectrices d’impôts et de cotisations sociales dont elles tirent quelques avantages. Enfin, tandis que les petites et moyennes entreprises (PME) bénéficient d’un taux réduit à 15 %, les pratiques d’optimisation et d’évasion fiscales permettent aux grands groupes de fixer eux-mêmes le montant de l’impôt qu’ils consentent à payer. Le bénéfice fiscal s’établit comme la différence entre les profits réalisés et les charges déductibles. En minimisant plus ou moins légalement le montant des profits déclarés et en gonflant celui des charges, l’entreprise peut ramener l’assiette de l’impôt à la dimension d’une soucoupe. Si on laisse de côté les pratiques frauduleuses de fausses factures et de ventes sans facture, deux postes de charges offrent en particulier de nombreuses possibilités : les provisions et les frais généraux.

Empilement de mesures désordonnées

Les provisions sont l’un des régimes les plus riches de la fiscalité, où l’imagination des pouvoirs publics vient au secours de celle, pourtant fertile, des entreprises. Ouvertes à toutes ou réservées à certaines ou à une poignée de secteurs privilégiés, elles se déclinent sous les formes les plus diverses : provision pour dépréciation, pour hausse des prix, pour fluctuation des cours, pour dépréciation du portefeuille-titres, pour risques afférents à des opérations de crédit, pour litige, pour créance douteuse... Ainsi, lorsque, en 2014, la justice américaine condamne BNP Paribas à une amende de 8,9 milliards de dollars, la banque française provisionne les frais de procès et d’avocats, avant de les « consolider en charges déductibles du bénéfice imposable ». Traduction du jargon comptable : un tiers du montant sera alors payé par la collectivité...

Quant aux frais généraux, il s’agit d’un fourre-tout extensible à volonté. À côté des charges d’exploitation bien réelles, on y trouve des dépenses dont on peut douter qu’elles soient utiles ou nécessaires à la réalisation du bénéfice. C’est le cas, en particulier, des dépenses des dirigeants transformées en charges d’exploitation, puis en éléments du prix de revient, et supportées en fin de parcours par le consommateur : un transfert légal sur les plus faibles des dépenses des plus favorisés.

Car les hauts cadres ont des goûts exigeants : hôtels de luxe, meilleurs restaurants, première classe dans les avions, limousines de fonction, cartes de crédit maison, sièges sociaux opulents, galas et réceptions somptueux, villégiatures de rêve. Séminaires, colloques ou réunions stratégiques ont plus souvent lieu dans des bâtiments historiques rénovés proches de terrains de golf, voire dans les meilleures stations de sport d’hiver, que dans des banlieues industrielles. L’État prête d’ailleurs son concours en louant les joyaux du patrimoine national pour les réceptions éblouissantes des dirigeants de grandes entreprises : Sainte-Chapelle, château de Versailles, Musée du Louvre... Un exemple parmi tant d’autres : en avril 2017, M. Bernard Arnault, première fortune de France, a reçu à dîner une brochette de deux cents invités de marque dans la prestigieuse salle des États du Louvre, entre La Joconde, de Léonard de Vinci, et Les Noces de Cana, de Véronèse, pour le lancement d’un modèle de sac Louis Vuitton. À la charge de l’entreprise, c’est-à-dire en partie à celle des contribuables.

Inventorier l’ensemble des niches fiscales relève de la gageure. On en compte plusieurs centaines, qui ne bénéficient pas uniquement aux entreprises. Leur coût global s’élève à plusieurs dizaines de milliards d’euros par an, pour une efficacité que la Cour des comptes conteste.

À la multiplication annoncée des zones franches, véritables zones de non-droit fiscal, s’ajoute la concurrence acharnée à laquelle se livrent les collectivités locales pour attirer les investisseurs en soldant leurs impôts. Réduction de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S : de 1 milliard d’euros en 2015 et de 2 milliards en 2016 ; exonération partielle ou totale de la taxe foncière ; sans parler des aides, subventions et prêts bonifiés, ou de la mise à disposition à prix cassés de zones industrielles et commerciales tout aménagées.

La fiscalité des entreprises consiste en un empilement désordonné de mesures de circonstance, prises sous la pression du patronat, sans cohérence ni évaluation sérieuse du rapport coût/efficacité. Tout se passe comme si les pouvoirs publics s’étaient résignés à brader au profit du privé leurs moyens d’intervention et leurs obligations d’assurer une équitable répartition des prélèvements fiscaux et parafiscaux. En témoignent les importantes réductions d’impôts consenties aux entreprises qui investissent dans l’humanitaire, le sport ou la culture, et dont les champions du CAC 40 savent si bien profiter pour se donner une image d’acteurs généreux et désintéressés... aux frais des contribuables (2).

De plus en plus coûteux, le crédit d’impôt recherche (CIR), de 5,5 milliards d’euros en 2016, ne donne lieu à aucune vérification sérieuse et régulière. Certains s’en servent pour financer des « recherches » en marketing ou en publicité, ou tout simplement pour alimenter leur stratégie en matière d’évasion fiscale.

Beaucoup plus considérable et dispendieux : le CICE, mesure-phare du « pacte de responsabilité » du précédent quinquennat, entré en vigueur en 2013, dont la facture a explosé. Il est passé de 6,43 milliards d’euros en 2014 à 12,6 milliards en 2016 et à 15,7 milliards en 2017. Un coût exorbitant pour un résultat décevant. Dans son cinquième rapport, en octobre 2017, le comité de suivi estime qu’il aurait permis de sauvegarder ou de créer de trois mille à... cent mille emplois. Autant dire qu’on n’en sait rien, sinon qu’il coûte plusieurs centaines de milliers d’euros par emploi !

Environ 80 % du prélèvement obligatoire global (POG) — en particulier la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les cotisations sociales — est prélevé chaque année par l’entreprise, sur le consommateur et le salarié, pour le compte de l’État, des collectivités locales et des organismes sociaux. Ainsi, les pouvoirs publics sous-traitent au secteur privé l’essentiel des prélèvements, et bientôt davantage encore quand l’impôt sur le revenu sera retenu à la source. Intermédiaire obligée, l’entreprise joue le rôle des fermiers généraux de l’Ancien Régime. Comme eux, privilège de la charge, elle en tire parti : banquier, mais pas philanthrope.

Suppression de la taxe sur les dividendes

Jusqu’à ce qu’elles soient reversées aux destinataires, les sommes collectées demeurent gratuitement à la disposition de l’entreprise. Durant un temps variable, d’un à plusieurs mois suivant les prélèvements concernés. Portant sur des centaines de milliards d’euros, l’avantage de trésorerie vient gonfler la marge brute (le cash-flow). Pour en optimiser la gestion, on pourra utiliser les cotisations sociales prélevées sur les salaires pour des spéculations boursières.

Sous la Ve République, la politique fiscale a toujours cherché à privilégier la grande entreprise nationale en favorisant les investissements — par des incitations, des déductions, des abattements, des réductions, des régimes spéciaux — et la formation de grands groupes par fusion et absorption, apport partiel d’actifs, constitution de holdings, sociétés mères et filiales. Avant de s’apercevoir que, avec la libre circulation des capitaux, les privilèges fiscaux bénéficiaient aussi aux multinationales susceptibles de prendre le contrôle des groupes français, et exigeant retour sur investissement par compression des coûts, licenciements et délocalisations. Avec l’accord et la complicité du patronat national, qui participe activement à l’optimisation fiscale — la « fraude légale », devenue un des objectifs majeurs de la « bonne gouvernance ». Avec l’aide coûteuse de cabinets d’avocats, de comptables, de fiscalistes, de consultants spécialisés, on construit une structure juridique par un enchevêtrement complexe de holdings, sociétés mères, filiales, sous-filiales et participations croisées permettant de transférer l’essentiel des bénéfices dans les pays à fiscalité réduite et dans les paradis fiscaux. Dans le même temps, des nuées de prédateurs en libre circulation mondiale, fonds vautours et fonds de pension, se ruent sur les entreprises à dépecer, siphonnant la trésorerie, liquidant les actifs, bradant les brevets, avant de prendre la fuite.

En réalité, le rendement net de l’IS, « le plus lourd du monde » selon le patronat, n’atteint pas la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Il a fortement baissé au cours des dernières années, alors que les bénéfices des entreprises n’ont cessé de croître. La baisse programmée du taux de l’IS, de 33,33 % à 25 % d’ici à 2022, sans révision de l’assiette, profitera surtout aux grandes entreprises, dont le taux effectif d’imposition est déjà systématiquement inférieur à celui des PME.

Il s’agit cependant là de taux assez théoriques : ils peuvent être largement inférieurs, voire nuls pour nombre de multinationales opérant en France. Car les données fournies ne tiennent pas compte des pratiques d’optimisation fiscale et d’ingénierie financière. L’agence France Stratégie a calculé par exemple que le rapport entre impôt et profits (hors États-Unis) dégageait un taux effectif d’imposition de 8,6 % pour Google et de 3,7 % pour Apple.

Dans un environnement prédateur qui ne se soucie guère de l’investissement, mais plutôt de la valeur actionnariale, la réduction de l’IS, la suppression de la taxe sur les dividendes de 3 % instaurée en 2012 (3) et la suppression de la dernière tranche de la taxe sur les salaires permettront de verser davantage de dividendes. En 2016, 45,8 milliards d’euros ont déjà été distribués, soit 57 % des bénéfices. Et ce sans effet notable sur l’emploi et l’investissement, mais avec une hausse des inégalités.

Les allégements fiscaux et parafiscaux annuels n’ont cessé de croître, passant de 11 milliards d’euros en 2014 à 34,5 milliards en 2017. Avec 101 milliards d’euros cumulés en quatre ans, l’assistanat aux entreprises, dont profitent surtout les plus grandes, bat tous les records. Une charge écrasante pour la collectivité.

(1) Depuis le 1er janvier 2018, le taux est ramené à 28 % pour des bénéfices inférieurs ou égaux à 500 000 euros. À cette disposition s’ajoutera en 2019 la baisse du taux à 31 % au-delà de 500 000 euros.

(2) Lire « Votre percepteur est coté en Bourse », Le Monde diplomatique, mai 2016.

(3) Invalidée par le Conseil constitutionnel en octobre 2017, elle doit être remboursée aux entreprises. Coût pour le contribuable : environ 10 milliards d’euros.

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13 février 2018 2 13 /02 /février /2018 09:45

Une étude inédite révèle la présence importante de dioxines et de PCB dans la viande de taureau ou les moules. La mairie soutient le dépôt d’une plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui. D’après Stéphane Mandard le 12 février 2018 pour Le Monde.

A Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône, le 21 juin 2017. ANNE-CHRISTINE POUJOULAT/AFP

A Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône, le 21 juin 2017. ANNE-CHRISTINE POUJOULAT/AFP

Voisins d’une des plus grandes zones industrialo-portuaires (ZIP) d’Europe, les quelque 100 000 habitants du golfe de Fos savent depuis longtemps que l’air qu’ils respirent n’est pas le plus pur de France. Mais ils ne se doutent pas encore que la viande, les œufs et les moules qu’ils consomment localement sont aussi contaminés par la pollution.

C’est ce que révèle une étude que Le Monde a pu consulter et dont les résultats devaient être présentés, lundi 12 février au soir à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), par l’Association de défense et de protection du littoral du golfe de Fos (ADPLGF). Ils constituent les derniers éléments d’un épais dossier que l’association, soutenue par la mairie de Fos-sur-Mer, a décidé, après quinze ans d’alertes, de transmettre à la justice avec le dépôt d’une plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui.

Entre 2009 et 2015, l’ADPLGF a piloté une campagne d’analyses sur des produits alimentaires du pourtour du golfe de Fos, qui compte une vingtaine d’installations industrielles classées Seveso : raffinerie, sidérurgie, chimie, incinérateur d’ordures… Des prélèvements ont été réalisés sur sept produits certifiés AOC (taureau de Camargue, mouton de Crau, fromages de chèvre, œufs de poules élevées en plein air, moules de Carteau à Port-Saint-Louis-du-Rhône, huile d’olive et foin de Crau) et des poissons du golfe. Deux laboratoires spécialisés (Carso, à Lyon, et Wessling, en Isère) ont recherché dans les échantillons une cinquantaine de composés chimiques. Et l’Institut écocitoyen pour la connaissance des pollutions, implanté à Fos et dont le conseil scientifique compte des chercheurs du CNRS, de l’Inserm et de l’INRA, a interprété les résultats.

Bataille judiciaire

Les conclusions les plus inquiétantes concernent la viande de taureau et les œufs. Des concentrations très élevées en dioxines, polluants organiques persistants considérés comme cancérogènes, y ont été trouvées. Sur les huit essais pratiqués depuis 2009 sur les échantillons de viande bovine, deux valeurs (25 % des échantillons) dépassent le seuil réglementaire (4 TEQ – équivalent toxique international – pg/g de matière grasse) alors que, sur 318 essais analogues réalisés sur toute la France depuis 2009 dans le cadre du plan de contrôle national, seul un dépassement a été enregistré (0,3 %). Concernant les œufs, des dépassements sont constatés sur la moitié des quatre prélèvements réalisés, contre seulement quatre pour 204 essais (2 %) à l’échelle du pays.

La présence de dioxines a aussi été mise en évidence à des valeurs supérieures à la moyenne nationale pour les fromages de chèvre et les moules ; à des niveaux moindres pour les poissons mais en constante augmentation depuis les premières mesures en 2009.

Les analyses ont également révélé des teneurs importantes en PCB (polychlorobiphényles), des perturbateurs endocriniens toxiques pour le développement cérébral et classés cancérogènes probables, pour les moules et les poissons, et des teneurs supérieures aux maximales nationales pour les œufs et la viande bovine. Elles montrent enfin la présence importante de métaux lourds (plomb et cadmium) dans les produits de la mer.

« L’objectif de cette étude n’est pas de détruire les éleveurs de taureaux ou de moules, insiste Daniel Moutet, le président de l’ADPLGF. Ils sont des victimes, au même titre que tous ceux qui ont des cancers à Fos ou à Port-Saint-Louis. » Aussi, Daniel Moutet souhaite les associer à sa démarche judiciaire en leur proposant, comme à tous les habitants du golfe, de déposer, au civil cette fois, des requêtes individuelles pour troubles anormaux du voisinage. « Cette volonté d’agir est le résultat d’un ras-le-bol », résume Me Julie Andreu, du cabinet TTLA & associés, spécialisé dans les dossiers santé-environnement (amiante, AZF…), qui déposera plainte contre X auprès du parquet du Marseille dans les prochaines semaines.

« Etat de santé fragilisé »

« On en a marre, dit Daniel Moutet. Cela fait quinze ans que l’on alerte, que l’on envoie des courriers aux ministres de la santé ou de l’environnement et qu’ils bottent en touche tous les malades. » Les premiers combats de l’association remontent à 2002 avec le projet d’implantation par GDF d’un terminal méthanier sur la presqu’île du Cavaou et à 2003 avec celui de l’incinérateur d’ordures ménagères de Marseille Provence Métropole à Fos-sur-Mer.

« Depuis quinze ans, on réclame en vain une vraie étude épidémiologique pour savoir si, effectivement, comme tout le monde le dit, il y a plus de cancers ici. Il n’y a même pas de registre des cancers dans le département », déplore René Raimondi, maire de Fos-sur-Mer depuis 2004, prêt à soutenir la bataille judiciaire qui s’engage.

Les habitants de Fos-sur-Mer et de Port-Saint-Louis-du-Rhône ont obtenu de premiers indices sérieux en janvier 2017. Une étude indépendante franco-américaine (Fos Epseal), financée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et conduite sur un échantillon de population limité, suggère que la prévalence des cancers, du diabète de type 1 et de l’asthme est supérieure aux moyennes françaises. Quant à l’étude d’imprégnation environnementale appelée de ses vœux par l’édile, c’est l’Institut écocitoyen qui s’y attelle. Les résultats, aussi attendus que craints, doivent être présentés en mai.

Sur la base d’une étude statistique rendue publique fin janvier, l’Agence régionale de santé (ARS) et la direction régionale de l’environnement (Dreal) reconnaissent prudemment « des indices de risques à long terme supérieurs au seuil de vigilance pour les effets cancérigènes, liés à la présence de plusieurs polluants sur des zones délimitées […] à proximité de certaines sources industrielles ». Fin 2017, l’ARS devait publier les résultats de l’Observatoire des cancers du rein, de la vessie et des leucémies aiguës dans le département des Bouches-du-Rhône. Mis en place en 2012 après le constat d’un taux élevé d’hospitalisations pour leucémies aiguës autour de l’étang de Berre, l’observatoire doit permettre de décider de « la pertinence d’installer un registre des cancers ». La publication a été reportée à fin 2018. « Nous sommes conscients que c’est long mais la collecte des données sanitaires et leur consolidation au niveau du département prennent du temps, explique Muriel Andrieu-Semmel, de l’ARS, qui reconnaît un « état de santé fragilisé » sur le golfe de Fos.

D’importants dépassements de rejets de benzène

Du côté des industriels, « on vit comme une injustice qu’on dise que beaucoup de gens sont malades à cause des usines », témoigne Marc Bayard, le vice-président du Groupement maritime et industriel de Fos qui regroupe les industries de la ZIP. « Nous sommes tellement conscients du problème de la pollution que cela fait quarante ans que nous travaillons de tous les côtés pour réduire les impacts environnementaux, assure-t-il. En dix ans, les rejets des principaux polluants ont diminué de 50 à 70 %, et cela continue. »

Pourtant, la plus grosse installation de Fos, ArcelorMittal, qui emploie environ 3 600 personnes, enregistre d’importants dépassements de rejets de benzène (gaz cancérogène) depuis 2016. Un rapport d’inspection environnementale d’octobre 2017 que Le Monde a pu consulter relève ainsi « des concentrations en benzène anormalement élevées (jusqu’à 10 fois la valeur limite) » et « la persistance des dépassements des émissions observées au niveau de la cokerie en 2016 ».

Sur la base de ce rapport, qui pointe également des dépassements pour les composés organiques volatiles ou les oxydes d’azote, le préfet des Bouches-du-Rhône a pris un arrêt de mise en demeure le 12 décembre 2017. Il donne à ArcelorMittal, qui demandait des délais supplémentaires, entre six mois et un an pour se mettre en conformité.

« C’est scandaleux et symptomatique, réagit le maire de Fos-sur-Mer. A chaque fois, l’Etat réagit avec retard. » René Raimondi est un enfant du pays. « Souvent, on me demande s’il est dangereux d’habiter à Fos. C’est dur d’entendre ça et de ne pas savoir quoi répondre. Quand quelqu’un est mis en danger, l’État doit prendre ses responsabilités. Tchernobyl, plus personne n’y vit. Quand on a construit le barrage de Serre-Ponçon, on a fait déplacer les habitants avant de noyer les villages. Alors qu’on nous rassure ou qu’on nous évacue. »

 

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9 février 2018 5 09 /02 /février /2018 19:25

WWF France a organisé, mardi, une visite de son nouveau siège installé au Pré-Saint-Gervais. Un bâtiment classé Haute qualité environnementale (HQE), qui accueille une centaine de salariés. D’après Ivan Capecchi le 8 février 2018 pour Le Parisien.

WWF France siège © Rabot Dutilleul Construction

WWF France siège © Rabot Dutilleul Construction

En entrant dans les locaux du nouveau siège de WWF France, le visiteur tombe nez à nez avec une biographie de Luc Hoffmann, inscrite à même le mur. C’est lui qui cofonda, en 1973, l’antenne française de cette ONG de protection de la nature. C’est aussi grâce à papa Hoffmann, et à sa dotation initiale de 7,5 M€ à la fondation, que le nouveau QG, situé rue Baudin au Pré-Saint-Gervais, a pu voir le jour.

Lucie Niney, l’une des architectes du site, se charge de mener la visite. Au pas de course, elle débite les nombreuses caractéristiques du bâtiment. « On a fait le choix, précise-t-elle d’emblée, de rénover un bâtiment existant. Le gain énergétique est énorme par rapport à une construction neuve. » C’est là, la spécificité du bâtiment : être 100 % écolo.

Recyclage des eaux de pluie, potager installé sur le toit-terrasse, récupération de la chaleur produit par les systèmes informatiques afin de chauffer le bâtiment… L’immeuble, classé Haute qualité environnementale (HQE), dispose même d’un parking à vélos intérieur. Seul inconvénient : le manque de luminosité, dû à la forme longiligne du bâtiment, pallié notamment par la présence d’un patio végétal en son centre. Un bel écrin, particulièrement protégé. Durant la visite, interdiction de prendre des photos et prière de ne pas parler aux salariés.

« On voulait s’implanter dans un territoire qui fasse sens, explique de son côté Pascal Canfin, le directeur général de WWF France. La Seine-Saint-Denis regorge d’innovations en matière de transition écologique. » L’ONG souhaite également s’insérer dans le tissu local. D’abord par la présence d’un espace de coworking, prochainement ouvert aux acteurs du territoire, mais aussi par le lien tissé avec les commerçants du coin. 80 salariés travaillent au siège, une aubaine pour l’activité locale. « Sur la partie restauration, cela représente 10 % de notre clientèle, ce qui n’est pas rien ! », confirme Christian Cazaubon, restaurateur-épicier au Café vert, un établissement situé à quelques minutes à pieds du siège de WWF.

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8 février 2018 4 08 /02 /février /2018 13:24

Dans un rapport sévère, la Cour des comptes dénonce le montage financier de ce « compteur intelligent » et les faibles gains pour l’usager. D’après Erwan Benezet, Matthieu Pellol et Nabil Wakim le 8 février 2018 pour Le Parisien et Le Monde. Lire aussi Ondes magnétiques, une pollution invisible et Compteurs Linky : pas de danger sanitaire.

La Cour des comptes dénonce le coût du déploiement des compteurs Linky

A qui profitent les nouveaux compteurs Linky ? A Enedis (ex-ERDF, filiale à 100 % d’EDF), mais certainement pas aux usagers, du moins pour l’instant. Ce constat sévère, ce n’est pas l’association de défense des consommateurs UFC-Que choisir — en guerre contre Linky depuis des années — qui le dresse, mais la Cour des comptes. Les sages de la rue Cambon, qui rendaient public leur rapport annuel hier matin, ont tiqué sur plusieurs points.

Enedis en profite bien

Alors que huit millions de compteurs « intelligents » Linky sont installés, le remplacement des 31 millions de vieux compteurs doit continuer jusqu’en 2024, à raison de 28 000 compteurs par jour actuellement. Coût : 5,7 Mds€. Mais le montage financier mérite qu’on s’y arrête. Car Enedis, qui avance l’argent pour l’instant, se remboursera — avec intérêts ! — dès 2021 auprès des usagers, par des augmentations de leurs factures. Au passage, selon le calcul de la Cour des comptes, Enedis empochera « une marge » de 500 M€. Un joli bonus !

La cour s’alarme également du mécanisme d’incitations mis en place : si Enedis prend du retard, les pénalités sont limitées. Mais si le projet réussit, les incitations sont très généreuses, et pourraient représenter plusieurs dizaines de millions d’euros supplémentaires pour Enedis. Les magistrats estiment donc que « les conditions de rémunérations d’Enedis sont généreuses et devraient être revues ».

La CRE et Enedis contestent ces conclusions et accusent la cour de faire « une analyse erronée » en négligeant les bénéfices apportés par les compteurs lorsqu’ils seront installés. La commission de régulation de l’énergie estime également que donner des conditions financières avantageuses et stables à Enedis était une des conditions de la faisabilité du programme.

Des bénéfices insuffisants pour les us agers

« Les coûts de pose des compteurs ont été optimisés, mais cette optimisation a été faite au détriment de la communication avec les usagers », fustigent les magistrats financiers. Avec un temps de pose moyen de trente minutes, il est dur en effet de faire de la pédagogie auprès des utilisateurs… Dommage, c’est l’autre argument massue de la Cour des comptes : « Les gains que les compteurs peuvent apporter au consommateur sont encore insuffisants. Ce sont pourtant eux qui justifient l’importance de l’investissement réalisé. »

Enedis, dans sa réponse, vante d’ailleurs les mérites des nouveaux services Linky : Linky promet des avantages clairs pour Enedis et les fournisseurs d’électricité (EDF, Engie, Direct-Energie, Total, etc.), avec notamment le relevé à distance et une meilleure connaissance de la consommation.

Mis à part le fait de ne plus devoir attendre le releveur à son domicile, Linky doit permettre au consommateur de mieux maîtriser sa consommation d’électricité et donc de faire des économies. Mais le rapport estime que les informations disponibles sont insuffisantes pour permettre aux utilisateurs de connaître leur consommation détaillée. Et souligne au passage que l’impact sur la consommation d’électricité pourrait être assez faible. Fin 2017, seuls 1,5 % des usagers disposant de compteurs Linky ont ouvert un compte pour connaître leur consommation.

Une prise en compte trop tardive des doutes exprimés

Le déploiement de Linky a fait surgir des doutes dans une partie de la population et de nombreuses critiques ont été émises, note la Cour des comptes dans son rapport. Les opposants s’inquiètent notamment des risques sanitaires liés aux ondes, même s’ils ne sont corroborés par aucune étude officielle, rappelle le rapport. Ils dénoncent également l’utilisation qui pourrait être faite des données de consommation par Enedis.

La Cour des comptes ne reprend pas ces critiques à son compte – elle souligne par ailleurs que les refus d’installation sont limités : un peu plus de 35 000 compteurs sur 6,1 millions n’ont pu être posés sur la période 2015-2017. Mais elle souligne un « défaut de pilotage » de la part de l’Etat et d’Enedis. Les études sur les conséquences sanitaires ou la protection des données privées sont arrivées trop tard, et n’ont pas été suffisamment communiquées au grand public.

Un soutien pour UFC-Que choisir

Il n’en fallait pas plus pour faire bondir UFC-Que choisir, ravie de trouver pareil soutien du côté de la Cour des comptes. « Les conditions de rémunération d’Enedis sont trop généreuses […] et les bénéfices annoncés pour les consommateurs sont loin d’être atteints », fustige l’association de consommateurs. De quoi également ravir les quelque 350 communes qui s’opposent par tous les moyens, comme des collectifs locaux ou citoyens, au déploiement de Linky sur leurs territoires.

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7 février 2018 3 07 /02 /février /2018 09:09

Chassée de nos assiettes, l’huile de palme s’est glissée dans le réservoir de nos voitures. Son élimination dans les moteurs d’ici à 2021 suffira-t-elle à préserver les peuples autochtones, premières victimes de cette production industrielle ravageuse ? D'après Alexandra Chaignon le mardi 6 Février 2018 pour l’'Humanité.

Infographie : L'Humanité

Infographie : L'Humanité

Le 16 janvier dernier, le Parlement européen se prononçait pour « l’élimination progressive » de l’huile de palme dans les agrocarburants d’ici à 2021. Le même jour, à Kuala Lumpur, des centaines de producteurs malaisiens d’huile de palme manifestaient, agitant des banderoles « Stop à l’interdiction de l’huile de palme » et « L’huile de palme nourrit ma famille ». Selon eux, une telle mesure détruirait les moyens de subsistance de la population rurale, soit quelque 3,2 millions de personnes…

Cette levée de boucliers résume à elle seule la controverse qui entoure cette production, entre impact social, environnemental et pressions commerciales. Marginale encore il y a quelques années, l’utilisation de l’huile de palme au niveau européen a massivement augmenté depuis 2009 : + 2,5 millions de tonnes entre 2010 et 2014, soit une augmentation de… 600 %. Un développement exponentiel qui s’explique par une avancée technologique, l’hydrotraitement, qui permet d’utiliser une plus grande quantité d’huile de palme pour produire le carburant. Et qui a été acté en 2009 par une directive européenne. En encourageant le mélange d’huiles alimentaires (colza, soja, palme) dans les carburants, il s’agissait de diminuer la dépendance au pétrole, gros émetteur de gaz à effet de serre, tout en offrant un débouché. Il s’agissait aussi d’offrir des débouchés aux agriculteurs en crise, ce que continuait à défendre, il y a quelques jours, le gouvernement malaisien, lequel estime que « les réglementations que l’Union européenne propose d’introduire nuiront aux communautés rurales et réduiront les revenus des familles ».

Solution environnementale et sociale, l’huile de palme intensive ? Faux, rétorquent de nombreux acteurs, selon qui elle a, en réalité, avant tout profité aux multinationales qui l’ont plébiscitée, parce que moins coûteuse que le soja ou le tournesol.

« Les rapports s’accumulent pour dénoncer les impacts des biocarburants, et en particulier l’huile de palme, sur le climat, la biodiversité et sur l’équilibre alimentaire mondial », rappelle Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes aux Amis de la Terre. Cultivé sous forme d’immenses monocultures, le palmier à huile est en effet la principale cause de déforestation en Indonésie et en Malaisie, et donc une source majeure de gaz à effet de serre. À l’usage répété des pesticides, à la pollution des sols et des eaux, à l’érosion de la biodiversité et à la menace d’extinction de nombreuses espèces végétales et animales (comme les orangs outangs) s’ajoutent aussi les atteintes aux droits humains. Les fermiers sont régulièrement victimes d’expropriation de terres, se retrouvant sans ressources. Et parfois même assassinés lorsqu’ils ne se laissent pas faire.

Une réalité confirmée par le Philippin John Mart Salunday, membre de l’ONG Coalition Against Land Grabbing (Calg, coalition contre l’accaparement des terres), venu en France à la mi-janvier pour témoigner à l’occasion d’un colloque organisé par la CFDT sur le sujet. « Si on compare les Philippines aux autres pays, c’est là où existe la meilleure protection des peuples autochtones. Le problème, c’est que la loi n’est pas respectée. Sur l’île de Palawan, classée par l’Unesco réserve de biosphère, 9 000 hectares ont été déboisés depuis 2008 malgré ce statut. Le gouvernement avait promis que la production était destinée aux populations locales, à des prix abordables. Dans les faits, 70 % de la production d’Agumil Philippines Inc (le plus gros producteur d’huile de palme de Palawan) part vers Singapour et la Chine. Des centaines de communautés autochtones ont perdu tout ou partie de leurs moyens de subsistance et arrivent à peine à nourrir leurs familles. »

L’entreprise singapourienne Wilmar contrôle plus de 43 % du commerce mondial

« Le gouvernement dit que nos terres sont abandonnées. C’est faux, elles sont utilisées pour nos cultures traditionnelles, qui impliquent des périodes de jachère pour permettre à la terre de se régénérer », renchérit Romeo Japson, invité lui aussi par le syndicat français. Lui est membre de la communauté de Palawan (Philippines), qui a perdu son autosuffisance et, avec elle, ses traditions. « Plus de 70 variétés de riz différentes étaient cultivées sur l’île. Un grand nombre ne le sont plus en raison de la production industrielle, alors qu’elles seraient utiles au regard du changement climatique, car elles ne poussent pas dans l’eau », souligne quant à lui Rustico Mauricio, membre de la communauté Batak, laquelle ne compte plus que 300 membres. « Avec l’expansion de la production industrielle, les peuples perdent leurs sources de revenus, c’est une vraie tragédie, reprend Romeo Japson, dont la communauté envisage de demander réparation et de monter un dossier auprès de l’OIT au nom de l’article 169 sur les droits des peuples autochtones. Beaucoup se posent la question : faut-il mieux lutter contre Agumil ou accepter leurs conditions pour gagner quelques sous ? » Ainsi, quand les cours de l’huile de palme baissent, les grosses compagnies font pression sur les petits producteurs, mais quand le prix augmente, il n’est bien sûr pas répercuté…

Car c’est bien de misère qu’il s’agit, la preuve avec l’entreprise agroalimentaire singapourienne Wilmar, qui contrôle plus de 43 % du commerce mondial de l’huile de palme. En 2015, ses revenus s’élevaient à 36,45 milliards d’euros. Mais les ouvriers de ses plantations et de ses fournisseurs ne gagnaient pas plus de 2,50 dollars par jour dans certains cas extrêmes. Sans compter que la multinationale est impliquée dans des incendies volontaires de forêts, des atteintes aux droits humains, accaparement des terres, travail des enfants, conditions de travail dangereuses ou encore discrimination envers les femmes… Dans le secteur, ces grandes entreprises tirent profit des violations des droits humains. En 2016, l’ONG Amnesty International a remonté la filière de l’huile de palme provenant de plantations en Indonésie : neuf multinationales réalisent ensemble un chiffre d’affaires d’environ 300 milliards d’euros. Huit de ces neuf entreprises font pourtant partie du principal organisme mondial chargé de rendre l’huile de palme plus durable, la RSPO (table ronde pour une huile de palme plus durable), créée en 2004.

« La certification ne règle rien. C’est un écran de fumée. La seule exigence pour pouvoir certifier l’huile de palme pour les biocarburants est qu’elle réponde aux critères européens de durabilité. C’est insuffisant et cela n’empêche en rien la déforestation. L’utilisation de l’huile de palme en carburant pousse la demande à la hausse et vu les volumes requis, conduit inévitablement à la création de nouvelles plantations. Ce qui se fait soit directement à la place des forêts naturelles, soit indirectement en augmentant la pression foncière et en conduisant à un déplacement des activités humaines vers les forêts », explique Sylvain Angerand. « Le label RSPO ne ralentit pas le rythme des déforestations, au contraire, affirme Dario Novellino, anthropologue à l’université du Kent et fervent défenseur des peuples à l’autodétermination. 84 000 km2 de forêts ont été perdus en 2012. En Colombie, 15 000 personnes ont été expropriées par Poligrow, qui est pourtant membre de la RSPO… » « L’huile de palme est tachée du sang de nombreuses personnes disparues. Dans ces conditions, peut-on dire véritablement que cette huile de palme certifiée est durable ? » interroge le chercheur. Longtemps utilisée en culture vivrière par les communautés indonésiennes ou africaines, la ressource n’est cependant pas sans avenir. « L’Europe ne dit pas qu’elle veut fermer la manne de l’huile de palme, mais celle de l’huile de palme utilisée pour les biocarburants. Au contraire, sur l’alimentation, il y a un vrai challenge, vu que la demande va augmenter. Il y a sans doute là une réponse, tout en commençant à maîtriser la demande locale, les terres n’étant pas extensibles », insiste Sylvain Angerand.

Si LA solution n’existe pas à ce jour, les associations ont des idées. « Il faut réfléchir aux modèles d’accords commerciaux. Quels sont les moyens pour réguler un commerce néfaste pour l’environnement, pour les droits humains, et incohérent du point de vue de l’économie, assène Julie Marsaud, coordinatrice du réseau forêt à France Nature Environnement (FNE). « Il faut se pencher sérieusement sur la question des biocarburants qui rentrent en concurrence avec la production alimentaire », estime pour sa part Arnaud Gauffier, chargé de programme agriculture durable-politiques agricoles au WWF, précisant qu’un « boycott mondial aurait des conséquences dramatiques sur les petits producteurs et les ouvriers ».

S’il est encourageant que les députés européens se positionnent sur l’interdiction de l’huile de palme dans les biocarburants, restera à voir quelle sera la position de l’État français qui, au moment du vote, a rétropédalé…

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Des animaux sauvages en grand danger

Avec le développement exponentiel des plantations de palmiers à huile, de nombreux animaux pâtissent de la destruction de leur habitat naturel. Les orangs-outangs, qui ne vivent plus à l’état sauvage qu’en Indonésie et en Malaisie, en sont les premières victimes. S’ils ne meurent pas dans les feux de forêt, ils sont braconnés. En Asie, les rhinocéros, les tigres, les éléphants sont également menacés. En Afrique, où l’exploitation de palmiers à huile se développe, gorilles et chimpanzés pourraient disparaître à l’état sauvage dans les dix ans à venir.

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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 14:00

A l'occasion de la Journée sans portable, l'association Agir pour l'environnement demande à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, d'interdire ces mobiles. D'après Frédéric Mouchon le 6 février 2018 pour Le Parisien.

LP/ LAURENT GENESLAY

LP/ LAURENT GENESLAY

Hélène le décrit comme un « combat quotidien » entre elle et son fils de 3 ans. Tous les jours, quand elle et son mari ont le dos tourné, Edouard subtilise le portable du papa pour « jouer aux bébêtes ». Pourtant « interdit d'écran », le petit est devenu accro à Clash of Clans, ce jeu sur mobile où l'on participe à des guerres entre tribus. « Il sait visionner tout seul des vidéos sur YouTube, soupire Hélène. Comme son cousin de 11 ans a déjà son portable, on a perdu d'avance, et si on arrive à tenir jusqu'à ses 7 ans sans lui acheter le sien, ce sera déjà bien. »

Inquiet de voir de plus en plus d'enfants pendus à un téléphone, l'association Agir pour l'environnement ira remettre ce mardi matin à la ministre de la Santé deux portables proposés aux tout petits pour lui demander d'interdire ces mobiles. Une initiative qui tombe à point nommé, le jour de la Journée sans portable.

Des modèles qui ressemblent à ceux des grands

Si l'association cible cette tranche d'âge, c'est parce qu'il existe désormais sur le marché des appareils qui lui sont spécifiquement destinés. Il suffit de taper « portable pour enfant » sur Internet pour découvrir des modèles vendus entre 30 euros et 135 euros qui fonctionnent généralement en wi-fi et permettent d'appeler cinq numéros préenregistrés, de regarder des vidéos, d'envoyer des messages instantanés, de télécharger des applications. Bref, des appareils pour bambins qui ressemblent à s'y méprendre à ceux qu'utilisent les grands.

« Pour beaucoup de parents, le portable, c'est une sorte de nouveau doudou censé les occuper et les calmer », s'alarme David Lajarge, auteur de « Tu vas lâcher ce téléphone » (Ed. Michel Lafon). Selon cet ancien coach en bien-être numérique, « enfermer son enfant devant un écran, c'est le condamner à être dans une espèce de bulle, faite de tunnels de vidéos et de jeux débiles ». L'Institut d'éducation médicale et de prévention (IEMP) a lancé lundi un site baptisé Lebonusagedesecrans.fr où des experts expliquent comment garder le contrôle et mettent en garde sur les risques pour la santé des enfants de ce trop-plein d'écrans : troubles du sommeil et de l'humeur, migraines, agressivité, désintérêt pour toute activité extérieure...

Inquiète depuis des années de l'impact sanitaire des radiofréquences, l'association Priartem remettra aussi ce mardi matin une lettre à Agnès Buzyn lui demandant de prendre en urgence un arrêté pour interdire ce type d'appareils. « Le système nerveux central des enfants est encore en formation et des études ont montré que leur cerveau absorbe jusqu'à 60 % de rayonnement électromagnétique de plus que les adultes, souligne la vice-présidente de Priartem, Jeanine Le Calvez. L'Agence nationale de sécurité sanitaire recommande de dissuader l'usage des dispositifs de communication mobile par des enfants de moins de 14 ans. »

 

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5 février 2018 1 05 /02 /février /2018 12:20

Ce document est l’un des premiers textes officiels décrivant en langage non technique les problèmes posés par ces substances, qui interfèrent avec le système hormonal des êtres vivants. L’IGAS recommande aux pouvoirs publics de renforcer leur action sur ces substances toxiques. D'après Stéphane Foucart le 2 février 2018 pour Le Monde. Lire aussi L’Union européenne adopte une définition des perturbateurs endocriniens, Perturbateurs endocriniens : le vote camouflet du Parlement européen, et sur le fond, Perturbateurs endocriniens : la fabrique d'un mensonge et Perturbateurs endocriniens : l’histoire secrète d’un scandale.

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), le Conseil général de l’environnement et du développement durable et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux ont remis à leurs ministères de tutelle, courant janvier, un rapport d’évaluation de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens commandé en août 2017 par le gouvernement.

Très attendu, le texte, que Le Monde a pu consulter, n’est pas encore rendu public ; il est singulièrement percutant. S’il dresse un bilan positif de l’action de l’Etat engagée depuis 2014 dans ce domaine, il en souligne de nombreuses limites au regard des enjeux, qualifiés de « majeurs pour la santé et l’environnement ». Les rapporteurs se montrent aussi, en creux, très critiques vis-à-vis de l’action conduite au niveau européen, notamment par la Commission de Bruxelles, et s’interrogent sur la « crédibilité » de l’action communautaire.

Incidemment, le rapport des trois institutions forme l’un des premiers documents officiels résumant, dans un langage non technique, l’étendue des problèmes posés par les perturbateurs endocriniens (PE), décrits comme sources de « très fortes externalités négatives », c’est-à-dire de dégâts collatéraux très importants. Ces substances – pesticides, plastifiants, solvants, etc. – sont présentes dans une grande diversité d’objets ou de produits du quotidien et dans la chaîne alimentaire. Elles ont en commun d’interférer avec le système hormonal des humains et des animaux.

Tarissement des financements

« Un certain nombre d’affections de la santé humaine sont aujourd’hui suspectées d’être la conséquence d’une exposition aux PE : baisse de la qualité du sperme, augmentation de la fréquence d’anomalies du développement des organes ou de la fonction de reproduction, abaissement de l’âge de la puberté, détaille le rapport. Le rôle des PE est aussi suspecté dans la survenue de certains cancers hormonodépendants, ainsi que des cas de diabète de type 2, d’obésité ou d’autisme. »

Les rapporteurs ajoutent que les effets de ces substances dépendent de l’âge de l’exposition, les impacts majeurs étant le fait d’une exposition « au cours du développement foeto-embryonnaire, de la petite enfance et de la puberté ». Les effets attendus étant différés dans le temps ou le résultat d’une exposition chronique, « le lien de causalité reste souvent difficile à établir », ajoutent les auteurs.

Mise en place en avril 2014, la stratégie nationale pour répondre aux défis scientifiques et réglementaires liés à ces substances est identifiée comme l’une des trois seules initiatives de ce type en Europe – avec la Suède et le Danemark. « Dans un contexte où l’Union européenne, pourtant chargée de réglementer le risque chimique, est en manque de stratégie cohérente, [cette stratégie nationale] était très opportune pour affirmer la volonté politique française d’agir sur un sujet complexe (…) prioritaire en santé-environnement », estiment les auteurs du rapport.

Mesures de réduction de l’exposition des populations (en particulier au bisphénol A), formation de professionnels de santé, investissement dans la recherche scientifique, identification des substances les plus problématiques : la stratégie française, estiment les trois institutions, a donné des résultats positifs. Même s’ils « restent le plus souvent à amplifier ». En particulier, les rapporteurs notent que les travaux de recherche conduits en France sur les PE ont produit des résultats, mais sont menacés par un tarissement des financements. « La réduction des moyens nationaux consacrés à la recherche depuis 2014, aggravée par les évolutions à l’échelon européen (…), a fragilisé la petite communauté scientifique qui s’est constituée depuis quelques années sur le thème des PE, ajoutent les auteurs. Celle-ci a tendance à se réduire par manque d’attractivité, avec un risque de pertes de compétences. »

Les travaux de recherche fondamentale sont d’autant plus cruciaux que certains PE échappent aux principes classiques de la toxicologie, selon lesquels l’effet délétère attendu est toujours proportionnel à la dose. « La quantité d’hormones nécessaire au fonctionnement du système endocrinien étant extrêmement faible, la perturbation de celui-ci peut résulter d’une très faible concentration de substances perturbatrices, notent les rapporteurs, ce qui rend inopérante l’analyse toxicologique classique consistant à définir des seuils à partir desquels le produit devient nocif. »

Impacts peu étudiés

Quant à la surveillance de l’exposition des populations aux PE ou de l’imprégnation de l’environnement, le rapport la juge « hétérogène », soulignant que « la surveillance des sols est quasi inexistante, et la surveillance de l’air est très en retard comparée à la surveillance de l’eau, cadrée par une directive européenne ».

Les impacts de ces substances sur les milieux et les écosystèmes ne sont pas suffisamment étudiés, plaident les auteurs, et ce alors qu’historiquement, les premiers effets des PE ont été relevés sur la faune et « ont servi de signal d’alarme pour la santé humaine ».

Les rapporteurs le disent sans fard : la question n’est pas seulement sanitaire ou environnementale, mais concerne aussi la crédibilité des pouvoirs publics. « Le différentiel entre la vitesse des avancées des connaissances scientifiques et la capacité d’adaptation des règlements sur ce type de sujets émergents est de nature à nuire à la crédibilité de l’action communautaire », écrivent-ils. Or, « les perturbateurs endocriniens s’inscrivent parmi les situations à risque caractérisées par un manque de confiance dans l’action publique ».

Outre le renforcement de la recherche, la réduction des expositions pour les populations à risque, et la surveillance de l’environnement, les trois institutions enjoignent au gouvernement de peser au niveau communautaire pour faire évoluer la réglementation européenne. A ce jour, les textes réglementaires de l’UE ne permettent pas d’exclure les PE, la Commission ayant accumulé un retard de plus de quatre ans dans l’adoption des critères d’identification de ces substances (dans le cas particulier des pesticides) – les rapporteurs rappellent d’ailleurs que l’exécutif européen a, dans ce dossier, été condamné en décembre 2015 par la Cour de justice de l’UE, pour carence.

Au total, le rapport plaide pour un renouvellement et un renforcement de la stratégie nationale lancée en 2014. Mais celle-ci doit être portée par l’ensemble des ministères concernés, au-delà de la santé et l’écologie, plaident les rapporteurs. « Il en va, écrivent-ils, de l’efficacité de sa mise en œuvre et de la crédibilité de l’action de l’Etat ».

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1 février 2018 4 01 /02 /février /2018 16:41

Un livre de Fred Magdoff et John Bellamy Foster, selon la critique de Jean-Pierre Garnier pour Le Monde Diplomatique.

Ce que tout écologiste doit savoir à propos du capitalisme

Avis à tous ceux qui croient encore aux vertus d’une « transition écologique » pouvant faire l’économie d’une transition vers le socialisme. C’est à eux que s’adresse cet ouvrage, synthèse claire de ce que la pensée critique anticapitaliste appliquée à la crise écologique a produit de meilleur outre-Atlantique.

Le capitalisme peut-il virer au vert ? Non, répondent les auteurs, montrant que les problèmes environnementaux majeurs ne peuvent se résoudre par des moyens technologiques tant que les rapports sociaux existants restent intacts. Même si les circonstances historiques les ont jusqu’ici empêchées de se rencontrer, les finalités de l’écologie (durabilité) et du socialisme (égalité réelle) sont indissociables. Le livre refermé, on aura compris que la « voie de la destruction planétaire » restera grande ouverte tant que perdurera le capitalisme. Optimistes, les auteurs invitent à en emprunter une autre, détaillée dans le chapitre final, qui, tirant les leçons des révolutions avortées du siècle passé, propose de « nouvelles possibilités d’émancipation humaine et de justice écologique ».

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28 janvier 2018 7 28 /01 /janvier /2018 09:05

Alors que le slogan " L'imagination au pouvoir " est devenu un mantra d'entreprise, il faut, selon l'universitaire, refuser la fausse alternative entre révolution néolibérale et conservatisme social. Le 25 janvier 2018 par Judith Revel.

Les Français n'ont pas toujours bonne mémoire, mais certaines formules survivent à l'effacement des événements auxquels elles sont liées. C'est le cas de " l'imagination au pouvoir ", énoncé drapeau de 1968. Déclaration de guerre aussi : une guerre de mots et d'images, de gestes et de pratiques, de cheveux soudainement longs, de désirs libérés, d'indignation devant l'injustifiable, d'espoirs joyeux, d'envie de liberté et de justice. Une guerre qui avait en haine la vraie guerre (le Vietnam – mais le souvenir de la seconde guerre mondiale n'était pas si lointain, et celle d'Algérie venait à peine de se terminer) et qui s'opposait à toutes les formes d'autorité : celle des parents sur les enfants, des hommes sur les femmes, du premier monde sur le second et le troisième, de la bourgeoisie sur la classe ouvrière, de la culture " haute " sur les formes d'expression populaire, de l'Eglise sur les mœurs, de l'Etat sur les citoyens, de l'université sur les savoirs, de la famille sur les choix personnels.

Une partie de la jeunesse se dressait contre une génération qui avait permis Vichy puis la défense sanglante d'un monde -colonial qui avait tourné à la guerre civile et dont la France sortait à peine. Changeons le monde, envahissons les rues et les places – nous, hommes et femmes de bonne volonté, ouvriers et étudiants, -immigrés et Français, qui n'avons pas- -demandé à hériter de ce dont se sont rendus responsables ceux qui nous ont précédés. Il s'agissait d'expérimenter de nouvelles manières d'être ensemble, de nouveaux modes de vie.

On réduit souvent les événements de Mai à une révolution hédoniste et libertaire, sexuelle et artistique, apanage de quelques milliers d'étudiants parisiens privilégiés ; on y voit les prémices de cet individualisme libéral qui est aujourd'hui notre lot, chacun voulant faire valoir ses propres désirs, son propre plaisir, ici, tout de suite, au détriment de tous les autres. Rien n'est plus faux : jamais 1968, avec sa soif d'expérimentations antiautoritaires, sa volonté de destituer tous les pouvoirs et de n'en prendre aucun, sa joyeuse envie d'inaugurer le monde, n'a perdu de vue que transformer le réel ne pouvait se faire qu'ensemble – à travers des expérimentations qui, sans exiger des différences qu'elles se conforment à un modèle unique, les laisseraient au contraire libres d'être ce qu'elles étaient. Il fallait créer une société où les différences cohabiteraient sans qu'aucune ne soit jamais considérée comme supérieure à une autre. " L'imagination au pouvoir " : le refus du pouvoir, l'envie d'un monde commun constitué de différences précieuses et riches, la guerre aux autoritarismes, aux égoïsmes et aux traditionalismes de tout poil.

Faut-il attendre la catastrophe ?

Aujourd'hui, le malaise ne naît pas de l'effacement de la mémoire, mais du constat que les mêmes mots qui avaient incarné l'espoir de 1968 – révolution, imagination, transformation – sont devenus le vocabulaire d'un néolibéralisme avide de disciplinariser les vies pour rendre les individus plus productifs et plus gouvernables. La sidération consiste en cela : l'imagination est le maître mot d'une mélasse idéologique qui voudrait que nous soyons d'autant plus dociles que nous sommes utiles, et vice versa. Or notre utilité productive, aujourd'hui, c'est notre faculté d'inventer. Mantra d'entreprise, " l'imagination au pouvoir " est une injonction à se transformer en permanence soi-même, à être plus créatif, plus innovant : il s'agit de dépayser le consommateur avide de nouveautés, d'écraser la concurrence par l'innovation, de capturer l'imagination sociale et de la breveter (c'est-à-dire de la privatiser), pour nourrir la course éperdue à la valorisation économique. " Sois inventif ou crève ", nouvelle formule magique de la sélection naturelle à l'époque du néolibéralisme.

La guerre de chacun contre tous est aujourd'hui une guerre d'imagination : c'est à qui sera le plus étonnant, rapide, inattendu, étrange, paradoxal. La marque même de notre assujettissement est cette obligation du transformisme, le culte de notre propre individualité, ce capital humain que nous sommes devenus et qui nous arrache au fourmillement joyeux et partagé de la socialisation et du partage.

Refuser les transformations néolibérales de la société ? C'est être attaché à des privilèges. Lutter contre l'institutionnalisation de nouvelles injustices ? C'est appartenir au passé. Dénoncer le " détricotage " des grands acquis sociaux ? C'est ne pas être " contemporain ". " Révolution " est aujourd'hui le mot favori de ceux qui réalisent la mise en pièces méthodique de nos vies sous prétexte qu'il faut accompagner le mouvement de l'histoire : une histoire dont ils présentent la (fausse) nécessité comme allant de soi, et dont ils disent être les auteurs exclusifs. Cette histoire n'est pourtant pas la seule, et leur usage de l'imagination n'est pas le nôtre.

Il est urgent et nécessaire à présent de se réapproprier l'imagination et la révolution : elles ne sont pas ce que vous en faites. Notre imagination consiste à dire, pour commencer : je refuse la fausse alternative entre révolution néolibérale et conservatisme social. Le tour de passe-passe qui consiste à inverser les pôles (le néolibéralisme comme facteur irréfutable de progrès ; la critique du néolibéralisme comme frein à la modernité) est obscène. Là où tout est tombé par terre, il faut inventer.

Faut-il la catastrophe pour voir fonctionner à nouveau à l'endroit l'imaginaire du changement ? Pas de réponse à cela – c'est là que commence, sans doute, la responsabilité politique. Libre à nous d'attendre la catastrophe. Libre à nous aussi de décider que l'attente du pire n'est pas bonne conseillère, parce que l'indignation n'attend pas, que l'imagination frémit en chacun de nous et serpente dans la totalité des rapports sociaux : nous voulons tenter d'inventer autre chose. Non pas en dépit du monde (nous ne voulons pas être utopistes), ou sur ses ruines (nous ne voulons pas être catastrophistes), mais dans et contre ce qu'il est.

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