Eva Joly à Rio pour un "tribunal éthique"
Dans un article paru le 22 juin 2012 sur le Figaro.fr, Eva Joly explique son engagement de défendre, à Rio, l’idée d’un "tribunal international éthique" et celle d’un système international de défense des militants de l’environnement.
La députée européenneEva Joly, candidate EELV à l’élection présidentielle, est venue défendre à la conférence sur le développement durable Rio+20 l’idée d’un "tribunal international éthique" et celle d’un système international de défense des militants de l’environnement.
Ce tribunal éthique, "symbolique", est une idée soutenue par le philosophe Edgar Morin et par le sénateur brésilien Cristovam Buarque, a-t-elle indiqué. "Sur le modèle du tribunal Russell, qui avait fait beaucoup pour arrêter la guerre au Vietnam, il s’attaquera aux crimes contre l’environnement", indique la députée européenne.
Présidente de la commission développement, elle estime par ailleurs qu’il y a besoin "d’un système international de défense des militants de l’environnement". Selon Eva Joly, il y cinq personnes détenues au Pakistan depuis août 2011 pour avoir dénoncé des violences à la suite des inondations dans la vallée de Hunza, d’autres aussi en Russie, des militants emprisonnés dans l’État de Para, au Brésil, où est édifié l’immense barrage de Belo Monte. "Il faut monter une veille et assurer leur défense, je voudrais lancer ça cet automne", indique Eva Joly.
Elle a par ailleurs estimé que le texte sur lequel les 191 pays de l’Onu se sont mis d’accord, dont la ratification devrait clore vendredi Rio+20, est "insuffisant". "Il y a un contraste entre l’urgence de la situation écologique et le peu d’enthousiasme des États à modifier leur comportement", a-t-elle souligné. Elle note encore "la lourdeur de cette façon de faire", estimant que ce n’est pas "par les États, obnubilés par le court terme, qu’on va y arriver". "C’est au niveau de la commune, des collectivités locales, qu’on peut mettre en oeuvre des politiques", dit-elle. "On a épuisé le modèle, il faut trouver de nouvelles façons de nous battre".
Publié le 22 juin 2012 sur eelv.fr
Rio est-il un échec ?
J’étais cette semaine à Rio au sein de la délégation française avec le Président de la République, Laurent Fabius, Nicole Bricq, et Benoit Hamon. J’ai donc participé aux négociations qui ont débouché sur la déclaration finale.
Je souhaitais vous faire part de mon analyse sur le texte final. Quel jugement porter sur ce texte ? Si on le juge au regard de ce qui serait nécessaire pour inventer un mode de vie à 7 milliards d’humains, compatible avec les limites de la planète, alors, oui, ce texte est nettement insuffisant. Comme le font remarquer les ONG, Rio+20 n’a pas apporté les réponses immédiates que l’urgence environnementale exige.
Toutefois « Rio+20 » n’est pas « Rio-20 » : nous avons évité la rupture avec les pays émergents. Pour avoir négocié jusqu’à tard dans la nuit, lundi soir, je peux témoigner, aussi paradoxal que cela puisse sembler, que le fait même d’avoir un texte était loin d’être acquis en début de conférence. Ce texte fait l’objet d’un accord mondial et c’est en soi est un acte politique fort. Il inclut des pays émergents pour lesquels l’acceptation d’une gouvernance multilatérale de la planète est encore loin d’une évidence quand leur priorité reste leur niveau de développement propre. A Rio, l’Union européenne unie, en liaison avec l’Afrique, a mis tout son poids politique pour éviter les régressions et obtenir quelques avancées.
Si l’on s’arrête sur le contenu du texte, le système des Nations-Unies reposant sur le consensus, cet accord manque évidemment d’objectifs contraignants. Pour autant, il offre des perspectives sur lesquelles nous pourrons construire. Je pense notamment à la plus grande visibilité donnée à la société civile. Plus que les Etats, les peuples peuvent être le moteur du changement vers le développement durable. Je pense aussi au renforcement du Programme des Nations-Unies pour l'Environnement (PNUE). Certes, Rio ne sera pas le temps de la création d’une agence pour l’environnement de l’ONU, mais ce cheminement continue son cours à travers ce renforcement.
Enfin, les Objectifs du Développement Durable (ODD) sont nés à Rio. C’est la première fois que la communauté internationale se met d’accord sur le principe de cibles et d’indicateurs du développement durable. Si nous n’avons pas obtenu une liste de ces ODD, à l’issu de Rio+20, nous nous sommes entendus sur un calendrier et une méthode. Comme Ministre chargé du Développement, je m’engagerai pleinement, avec vous et la société civile, dans ce chantier qui s’ouvre.
La déception, qui peut être la votre et qui est aussi la mienne, ne doit pas nous empêcher de reprendre dès demain notre combat pour un monde soutenable, car l’urgence environnementale demeure. Rio+20 nous ouvre des chantiers, j’aurai à cœur de les mener à bien car construire la gestion soutenable de notre planète est plus que jamais notre priorité.
Pascal Canfin, ministre délégué au développement